Le travail hybride semble être devenu la norme. Pour autant, quel est son impact dans les entreprises ? Et notamment sur les managers ? Si le télétravail offre un meilleur équilibre vie pro/vie perso, il ne faut pas non plus négliger le collectif. Et un retour définitif au bureau supposerait la fin d’un acquis, précieux pour beaucoup. Comment trouver le juste milieu ? En apprenant à repenser les organisations.

Dans le cadre d’un travail hybride, la confiance serait-elle une affaire de position ? D’après le Baromètre Phygital Workplace réalisé par le cabinet de conseil Julhiet Sterwen et l’Ifop, dévoilé le mardi 11 avril 2023, 87 % des managers estiment que l’adoption d’une organisation hybride favorise la confiance. 86 % veillent même à rendre leurs collaborateurs plus autonomes. Chez les non-managers, la perception est différente, car ils ne sont que 60 % à sentir qu’on leur fait davantage confiance. Le cabinet explique ce décalage par « par une difficulté à modifier des habitudes managériales bien ancrées ». Pour Sacha Lopez, fondateur du Work Lab et co-auteur du Guide de survie au management hybride (éditions Pearson), il s’agit de redessiner les réalités hybrides. « C’est assez compliqué : lors du télétravail généralisé, chacun s’est débrouillé seul. Aujourd’hui émergent des problématiques liées au manque de sens collectif. Si chacun a bénéficié de ce que peut apporter le télétravail, cela se fait parfois au détriment des règles communes du vivre ensemble, développe-t-il. Dans ce mode de travail, on voit les bénéfices tout de suite, mais on ne réalise pas trop les dangers à long terme, comme l’est la perte de sens collectif et de tout ce qui définit un groupe. »

Des règles de fonctionnement à distance

Aujourd’hui, toujours d’après le baromètre Julhiet Sterwen/Ifop, ce qui motive avant tout les salariés à se rendre physiquement dans les locaux de leur entreprise, c’est l’obligation. Le contact social avec les collègues est cité en deuxième position. En revanche, seulement 15 % des salariés se considèrent plus efficaces au bureau qu’ailleurs. Cela va de pair avec la considération des nouveaux modes de collaboration. Pour éviter de tomber dans le piège des visioconférences à outrance, 67 % des managers ont défini des règles de fonctionnement encadrant les réunions à distance. Une organisation nécessaire que Sacha Lopez appelle de ses vœux : « Le travail hybride amène en quelque sorte une surcharge collaborative. Il y a un effet millefeuille : au lieu de remplacer une réunion physique par une visio ou du tchat, tout s’accumule. Il faut des règles communes dans la communication digitale. » A chacun donc de savoir maitriser les différents canaux de communication et de se mettre d’accord sur leur usage. « Par exemple, le collectif doit définir les temps de réponse attendus selon les canaux : le mail, c’est de l’ordre de la journée ; le tchat, c’est de l’ordre de l’heure ; le téléphone, c’est le canal d’urgence », énumère l’auteur.

Détecter les signaux faibles

Dans ce contexte où le lien direct n’est plus la norme, il est également complexe, pour les managers, d’être en mesure de toujours détecter les signaux faibles. Une majorité d’entre eux avouent connaitre des difficultés dans l’évaluation de l’engagement ou de la véritable charge de travail à distance. Une solution que propose Sacha Lopez ? L’instauration de speed meetings entre un manager et son collaborateur. « Ces rencontres très courtes, de 10 minutes toutes les semaines ou toutes les deux semaines, permettent de ritualiser des points rapides, mais réguliers. Les managers recueillent ainsi des retours des collaborateurs, même des personnes plus timides ou introverties qui interviennent peu en visioconférence », affirme-t-il.

Le télétravail est perçu différemment selon les individus. Il y a ceux qui veulent revenir au bureau à bon escient seulement, d’autres pour lesquels ce bureau est indissociable de l’équipe. « Avant, le travail et le lieu de travail, c’était pareil. Désormais, le lieu n’est plus l’élément central », commente Sacha Lopez. Par ailleurs, le Baromètre Phygital Workplace pointe le risque de désengagement, qui touche aussi 60 % des managers selon les estimations de l’Ifop. En cause ? Le fait de ne pas être à l’aise avec le management hybride. « Nous ne sommes pas tous égaux dans les rapports à l’autre. Il y en a qui ont besoin de solitude et de calme : ils sont très heureux en télétravail. D’autres personnes ont besoin de se nourrir de collectif et ont besoin d’aller au bureau, d’être sûres qu’elles y rencontreront leurs collègues. Le manager doit gérer tous ces cas de figure », décrit Sacha Lopez. C’est pourquoi, il insiste sur la nécessité d’acquérir de nouvelles bases du « travailler ensemble ». « Ce sont des règles du jeu communes, qui n’étaient pas forcément utiles avant », glisse-t-il. Et pour faire accepter ces nouvelles règles, il faut de la co-construction. A chaque manager de se réapproprier la culture d’entreprise et de veiller à diffuser l’information autrement. Ces habitudes ne sont certes pas nouvelles, elles sont préconisées depuis longtemps, mais désormais les organisations doivent s’en emparer nécessairement.

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Diplômée en lettres modernes, Céline Tridon a suivi une formation en journalisme à l’IPJ. Elle y a confirmé son envie de travailler pour la presse écrite et web, souhait exaucé à travers la collaboration avec différents supports sur les thématiques « entreprise », « monde du travail », « management » et « RSE ». En 2023, elle reprend la rédaction en chef de My Happy Job.

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