L’environnement économique en mutation, des clients toujours plus exigeants ainsi qu’une concurrence exacerbée : les organisations sont en plein chambardement. Pour maintenir leur performance, de plus en plus d’entreprises se tournent vers l’innovation, pas uniquement marketing ou technologique, mais managériale. Accélérateurs d’engagement et fédérateurs d’équipes, les nouveaux modes de management, plus participatifs et collaboratifs, sont largement plébiscités par les salariés français : 72 % d’entre eux souhaitent que leur entreprise investisse dessus. Loin d’être une tocade, l’innovation managériale est une tendance qui marque « la généralisation d’un certain nombre de pratiques qui existent depuis longtemps mais qui restaient marginales », souligne Jean-Michel Moutot. Professeur de Management à AUDENCIA Nantes, Docteur en Gestion de l’école HEC Paris, et membre du comité scientifique de la chaire ESSEC du changement, l’auteur de nombreux ouvrages sur l’innovation managériale propose trois pratiques pour s’initier facilement avant 2020.
L’innovation managériale : plus qu’un simple concept !
« Les salariés ne sont pas fatigués de travailler, mais de mal travailler » soulignait le psychologue du travail Yves Clot. Bonne nouvelle, l’innovation managériale propose une rupture avec les anciens modes de collaboration hiérarchiques initiés à l’ère industrielle. Selon Jean-Michel Moutot, elle repose sur des méthodes et outils de travail qui rompent avec le « command and control » taylorien : « C’est surtout un état d’esprit et de nouvelles postures managériales dont le but est d’infuser durablement des modalités de travail moins descendantes ».
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Le hackathon
90 % des salariés estiment qu’ils devraient être consultés dans l’élaboration de la stratégie d’entreprise. Or, seuls 25 % d’entre eux semblent satisfaits de l’attention portée à leur opinion. Comment les faire contribuer plus activement aux problématiques d’entreprise ? Le terme hackathon – contraction de « hack » (activité qui consiste à modifier l’un des éléments d’un logiciel) et « marathon » – est une forme de challenge accéléré invitant les participants, à contribuer à l’élaboration d’un produit, d’une solution ou d’un plan d’actions. Jean-Michel Moutot précise : « Dans un temps extrêmement court (2 à 5 jours) et un lieu lieu donné, il s’agit de rassembler salariés, hackers ou encore experts externes pour élaborer des solutions à des problématiques concrètes avec, si possible, une trajectoire de mise en oeuvre ». Le plus ? « Généralement, les personnes en interne sont très motivées à condition que le sujet proposé soit porteur. »
Et c’est loin d’être réservé aux grands groupes : « On peut le pratiquer en PME, dans le privé ou le public. On en voit de plus en plus dans le cadre de concertations sur l’aménagement des villes. Le Conseil Général du 92 en a lancé un récemment ouvert à tous : salariés, citoyens… Le but était de glaner des idées et construire un plan d’actions pour renforcer son attrait touristique. »
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Un « Shadow Cabinet »
Aussi appelée « Shadow Comex », cette instance interne, souvent composée de jeunes de moins de 35 ans, a pour mission de porter un regard critique sur les décisions stratégiques de l’entreprise. Jean-Michel Moutot explique pourquoi son rôle est de plus en plus cardinal au sein des organisations actuelles : « Les jeunes générations ont beaucoup à apporter aux comités décisionnels grâce à leur regard neuf sur les mutations numériques. Leur maîtrise du digital en fait une mine d’informations car il existe un gros gap dans l’usage des technologies entre générations ».
Lagardère Travel Retail en a fait l’expérience avec des étudiants d’Audencia sélectionnés et accompagnés par Jean-Michel Moutot. Il explique : « J’ai monté un shadow cabinet avec le COMEX afin d’améliorer l’expérience client au sein des magasins d’aéroport. L’enjeu était de découvrir de nouveaux business models et pratiques liés au digital. Un sujet, à la base, peu stratégique pour eux. Les étudiants leur ont fait des recommandations pour bâtir une nouvelle stratégie digitale ». Résultat ? Les idées ont été bien reçues et testées pour certaines : « Suite à cette expérience, ils ont créé une cellule d’innovation, avec un important volet digital, rattachée directement à un des membres du COMEX ».
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Les ateliers participatifs
En France, les salariés passent près de 3 semaines par an en réunion. Pire : seuls 52 % d’entre eux les considèrent comme productives. Pour y remédier, Jean-Michel Moutot souligne l’importance du mode participatif. « Pour un manager, à décision identique, le mode collaboratif est plus impactant à long terme car la motivation est nettement supérieure ! Plus l’implication des collaborateurs est faite en amont, plus l’adhésion sera rapide. C’est un investissement… mais à terme, cela fonctionne mieux ».
Comment créer des ateliers participatifs et changer les pratiques internes ? EDF a monté son propre réseau: des « labs » d’innovation internalisés. N’importe quel manager peut venir animer un atelier avec son équipe. « Le but est de sortir du quotidien et de vivre une expérience collaborative pour réfléchir à une problématique, co-créer, trouver des idées… Tout est à disposition : livres, méthodologies, outils, support numérique… ». Pour soutenir les managers, des référents internes se tiennent à leur disposition. Selon Jean-Michel Moutot, « c’est une tendance forte notamment au sein des grands groupes. Des communautés de facilitateurs se créent pour accompagner et diffuser les bonnes pratiques. Chez EDF, ils sont déjà 200. »
Cette configuration suppose d’internaliser au maximum les savoir-faire en termes de leadership innovants… Pour les aider, Jean-Michel Moutot a récemment lancé Wiobox, des kits d’ateliers participatifs clé-en-main sous la forme d’abonnement. « Le but est d’outiller ces communautés internes en fonction de leurs problématiques (gestion de projet, team building, innovation business…), de les rendre autonomes et de renouveler au maximum les ateliers pour générer de l’innovation en continu. C’est la clé. »
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