Boss versus Leader concept on chalkboard

Le leadership, c’est compliqué. Trop… Entre le leadership situationnel, transformationnel, authentique, charismatique, serviteur et j’en passe, impossible de s’y retrouver. Revenons donc à des choses simples, atteignables et pour lesquelles vous avez forcément des modèles en tête que vous allez pouvoir facilement imiter. Voici donc un nouveau concept, le leadership pathétique (ou « Pathetic Leadership » parce que ça en jette toujours plus en anglais) ! Et les quelques règles simples pour y parvenir :

–          Parlez de vous sans cesse, pour vanter vos qualités : affublez-vous de qualificatifs grandiloquents comme décidé.e, brillant.e, charismatique, supérieurement intelligent.e… Narrez également vos exploits passés : comment vous avez relevé les situations (forcément) dramatiques laissées par vos prédécesseurs (nécessairement incompétents).

–          A l’inverse, passez votre temps à dénigrer, dévaloriser, critiquer ce que font les autres. Tous les autres. Cela ne fera que renforcer le contraste avec vos performances stellaires.

–          Partez du principe que votre statut (directeur.trice, chef.fe de je-ne-sais-quoi) suffit à témoigner de votre leadership. Vous pouvez avoir décroché votre promotion à l’ancienneté ou faute de mieux, mais peu importe : vous êtes boss, donc forcément leader !

–          Confondez leadership et autorité (encore mieux : autoritarisme !), en utilisant des injonctions du type « tu le fais, parce que je te le demande et que c’est moi le chef ! ». N’expliquez surtout pas le contexte ou les objectifs, cela risquerait de donner du sens au travail des autres. Réduisez-les, au contraire, à de simples exécutants décérébrés dès que le pouvez.

–          Partez toujours du principe que vous en savez assez et, surtout, que vous savez mieux que les autres. Si jamais vous vous aventurez à poser des questions aux autres ou à leur demander leur avis (quelle idée… mais enfin, supposons), attachez-vous à ne jamais écouter les réponses et embrayez à la place rapidement sur vos qualités et exploits passés.

–          Refusez qu’on vienne vous voir pour résoudre des problèmes. Vous n’êtes pas là pour cela. Exigez qu’on vous apporte des solutions et non des problèmes. Ce sera la preuve que vous êtes un vrai leader, puisque vos équipes seront capables (ou bien obligées…) de se débrouiller sans vous.

–          Lorsque vous demandez quelque chose, exigez-le pour tout de suite. Rappelez dix minutes après avoir donné une instruction pour savoir où cela en est (et bien évidemment de manière répétée ensuite, de sorte que les autres n’aient même pas une minute pour faire ce que vous leur avez demandé). De manière générale, ne tenez aucun compte de ce que les autres ont, par ailleurs, à faire : c’est vous le chef, donc cela n’a aucune importance !

–          Adoptez de grands discours avec tout plein de mots à la mode totalement incohérents avec ce que vous faites réellement au quotidien. Au choix : « entreprise libérée », « esprit start-up », « intraprenariat », « disruptif »…

–          Enfin, ne craignez pas d’abuser de la technique suprême de l’injonction paradoxale : par exemple, demandez de l’initiative, tout en exigeant de la soumission ou demandez à ce qu’on vous parle vrai, tout en vous énervant quand on dit quelque chose qui vous déplaît.

Toute ressemblance avec des personnes rencontrées lors de votre carrière n’est peut-être pas fortuite. NB : cette chronique est, bien sûr, du second degré, et vous y trouverez en creux, de bonnes pratiques à adopter d’urgence !

Christophe Deval est directeur du développement des talents chez KPMG, psychologue clinicien, thérapeute spécialisé en thérapies comportementales et cognitives (TCC) et en thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT), co-auteur de Simplifiez vos relations avec les autres (Intereditions).

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Crédit photo : Fotolia – © patpitchaya

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Diplômé de l’ESSEC, psychologue clinicien et thérapeute praticien en thérapies comportementales et cognitive, Christophe Deval est spécialisé dans le développement de la flexibilité psychologique et comportementale et l’ACT (Acceptance and Commitment Training). Après 5 ans d’expérience en audit financier, puis 15 ans en ressources humaines, il a quitté KPMG où il était Directeur du Développement des Talents jusqu’en 2018 pour créer la société A.Life, dont la vocation est de développer l’agilité individuelle, relationnelle et collective, et plus généralement les soft skills internes. Il est co-auteur de « Vous avez tout pour réussir », « Simplifiez vos relations avec les autres » et auteur de « Découvrir l’ACT ». LinkedIn

3 Commentaires

  1. Bonjour Christophe

    J’ai beaucoup aimé cet article : plein d’humour !
    Et pourtant, on voit bien que ce type de leadership peut être nocif pour les salariés avec qui l’on travaille.

    Par contre, attention à ne pas mettre trop la pression sur les “leaders”. On attend beaucoup, mais alors beaucoup trop d’elles et d’eux.
    Ce ne sont pas des messies, ils-elles ont aussi des failles, et il ne faut pas l’oublier.

    Au plaisir
    Evan, un papa patron

    • Bonjour Evan. Je suis tout à fait d’accord et je ne cherchais bien évidemment ni à minimiser l’impact sur les salariés ni la pression sur les leaders. J’avais surtout en tête en écrivant cette chronique le manque d’humilité de certains “leaders” qui croient tout bien faire alors que c’est l’inverse. Etre humble, faire de son mieux: déjà avec ça, on doit pouvoir éviter une bonne partie des deux écueils (nocivité sur les autres, pression pour soi…).
      Christophe

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