Engager ses collaborateurs, on le sait, c’est essentiel. Mais les managers ont-ils toutes les cartes en main pour mener à bien ce projet ? Souvent partagés entre l’opérationnel et les besoins de l’équipe, les managers sont débordés. Comment bien driver son équipe pour un collectif plus motivé ? Réponse avec Ludovic Girodon, auteur de Dream Team (éditions Marabout).
Dans la nouvelle édition de votre livre Dream Team (Marabout), vous présentez la méthode « Dream » : en quoi consiste-t-elle exactement ?
Ludovic Girodon : Elle s’est dégagée du travail préparatoire à ce livre. Je suis allé à la rencontre de plusieurs centaines de managers et en discutant avec eux, aussi parfois avec leurs équipes, je me suis rendu compte qu’il y avait systématiquement cinq grands besoins fondamentaux qui revenaient de la part des collaborateurs : Direction (avoir du sens), Reconnaissance (être valorisé), Environnement social (créer des liens de confiance), Autonomie (être responsabilisé), Montée en compétences (apprendre de nouvelles choses).
Aussi, j’invite les managers à garder en tête quel est le besoin fondamental de chacun de leurs collaborateurs pour être en capacité de les accompagner de la meilleure manière possible. Le premier pas vers cette méthode, c’est d’avoir compris que, parfois, il était nécessaire de mettre sur pause l’opérationnel et d’avoir des discussions avec ces collaborateurs où on prend de la hauteur.
S’agit-il aussi de cette nécessité de personnaliser l’approche selon chaque collaborateur ?
Oui, exactement. C’est réussir à comprendre son équipe collaborateur par collaborateur : chacun a des attentes qui lui sont propres. Le sentiment de manque peut faire qu’on perd un talent de manière prématurée. L’opérationnel fait tourner la boutique à très court terme. Mais pour bâtir une équipe solide à moyen et à long terme, on a besoin de s’intéresser à ce qui se passe dans la tête de chacun.
Quels sont les outils sur lesquels se base la méthode Dream ?
Le premier outil à mettre en place, c’est le temps d’échange. Sans points individuels, il ne peut pas y avoir de temps de qualité fréquent avec ses collaborateurs. Ce n’est pas à la machine à café, entouré de trois autres collègues, ou en abordant un sujet urgent (une réunion prévue le lendemain matin par exemple), qu’on arrive à avoir ce genre de discussion.
Ensuite, il faut savoir poser la question de quel est le besoin à combler. Parmi les cinq énumérés auparavant, quel est celui qui a le plus d’importance pour le collaborateur – voire peut -il les classer par ordre d’importance ?
Généralement, le besoin le plus vital qui ressort, c’est celui qui n’est pas assez nourri. Aussi, il faut s’interroger sur le plan d’action à co-construire ensemble pour faire en sorte que ce besoin soit comblé… Parfois le manager n’a pas les clés pour apporter la solution attendue, comme dans le cas d’une demande d’augmentation, par exemple. Or, ce n’est pas parce qu’on ne peut pas résoudre un problème qu’il ne faut pas ne pas en parler. Ce genre de discussion sert, déjà, à positionner le manager non pas comme un contrôleur des travaux finis, une personne chargée de balayer la to-do liste de son collaborateur, mais comme un partenaire de la réussite professionnelle de son collaborateur.
Je recommande de réaliser cet exercice tous les 6 à 12 mois, soit le laps de temps nécessaire pour se resynchroniser. Les envies et les attentes évoluent.
On parle de plus en plus de la notion d’engagement : pour autant, les managers savent-elles l’appréhender correctement ?
Oui et non… Un manager qui est vraiment fait pour ce rôle-là, c’est quelqu’un qui est centré sur son équipe, qui est à l’écoute, qui capte les signaux forts et les signaux faibles, qui crée des temps de qualité pour justement réussir à anticiper une baisse éventuelle de l’engagement. Le problème, c’est que la majorité des managers sont débordés. Ils passent en mode « pompier », à gérer l’opérationnel de l’organisation et à porter l’équipe surtout lors de situations de crise, lorsqu’un gros conflit éclate, qu’un collaborateur annonce son départ ou fait un burn-out.
Côté managers, quels sont les besoins les plus exprimés ?
Le premier sujet, c’est celui du temps : les managers mènent sans cesse une course contre le temps, jonglant entre le rôle de manager et celui d’opérationnel. Il y a un jeu de dupes assez important dans les entreprises : on attend beaucoup des managers et pour autant, on ne leur donne pas forcément les moyens de bien faire leur métier. Aujourd’hui, manager, c’est un travail fourre-tout, derrière lequel on met beaucoup de choses et même trop de choses pour une seule femme ou un seul homme.
L’autre difficulté souvent exprimée, c’est la relation avec leur propre manager, soit un désalignement avec la direction, avec des impératifs qui leur sont demandés et qui sont, selon eux, irréalistes par rapport aux ressources qu’ils possèdent.
Enfin, le troisième élément qui m’a été remonté, c’est la motivation (au sens large) du collectif, souvent liée en fait à une personne ou deux dans l’équipe, qui peut avoir un comportement toxique, ou du moins négatif. Cela fait qu’il y a beaucoup d’énergie qui est drainée en dehors de l’équipe, alors qu’elle devrait être mise au service du travail et de la feuille de route.
Quelle est, selon vous, la définition d’une bonne équipe ?
Une bonne équipe repose sur la clarté des objectifs et des rôles de chacun. Je vois beaucoup d’équipes dysfonctionnelles, alors qu’il y a des super talents et que ça se passe plutôt bien entre le manager et ses collaborateurs. Pourquoi ? Car il y a ce manque de transparence sur le cap collectif et individuel à atteindre, afin que chacun comprenne pourquoi il est là. Chacun doit savoir pourquoi il se lève chaque matin, quel est le projet collectif auquel il participe, quel est son rôle et quel est celui de ceux qui l’entourent. Ainsi, il comprend qu’il a besoin des uns et des autres et ça, c’est le début d’une bonne équipe.
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