Potentiel intellectuel, émotionnel ou sensible : les profils atypiques doivent encore parfois chercher leur place dans la société. Dans son livre « Femme aux multi-potentiels » (éditions Jouvence), la médiatrice diplômée en psychologie et psychanalyse Elodie Crépel s’intéresse tout particulièrement aux femmes atypiques. Ces dernières peinent davantage à se reconnaitre et à accepter leurs aptitudes.
Dans votre livre, vous distinguez ‘multi-potentiels’ et ‘multipotentiels’. En quoi s’agit-il de deux notions différentes ?
Dans ‘multi-potentiels’, en ajoutant le tiret, on parlera de divers potentiels, donc de femmes atypiques : le potentiel sensible avec l’hypersensibilité, le potentiel intellectuel avec la douance, le potentiel émotionnel ou HPE. La multipotentialité est, elle, différente : c’est la capacité à s’intéresser à pleins de sujets à la fois. Ces personnes ne sont pas expertes d’un seul domaine, mais très bonnes dans plusieurs. C’est d’ailleurs propre aux slasheurs, ceux qui exercent plusieurs métiers.
Pourquoi vous intéresser spécifiquement aux femmes atypiques ?
J’aimerais que les femmes voient leur potentiel. A travers ce livre, je veux leur donner les clés pour les aider à le déployer. Et avoir de la confiance ! Dans ce par quoi elles passent, il y a souvent beaucoup de doute et un manque de confiance. Il y a toujours cet aspect ‘ j’attire les problèmes, il y a quelque chose qui ne va pas chez moi’. Mais lorsqu’elles dézooment, elles se comprennent et elles comprennent ce par quoi elles sont passées, pour qu’elles puissent tourner la page de ce qui a été difficile.
Ce manque de confiance est-il propre aux femmes ?
Les hommes, aussi, bien évidemment sont concernés ! Mais généralement, chez les femmes, il y a quand même des spécificités. Par exemple, le complexe du caméléon que j’ai féminisé en ‘caméléone’ : les femmes vont se sur-adapter, et ce très volontairement parfois par esprit de survie. Ainsi, elles créent une inhibition intellectuelle. Les hommes essayent de prioriser l’intellect. Les femmes, c’est seulement dans un contexte particulier qu’elles en auront le droit ou qu’elles s’accorderont le droit de démontrer leurs capacités intellectuelles. Aujourd’hui, si beaucoup de femmes osent s’interroger sur leur haute sensibilité, très peu osent le faire sur leur potentiel douance. Si elles découvrent leur douance, elles seront dans une dualité, entre le soulagement et la panique totale. Elles auront cette sensation que cela remettra tous leurs choix en question. Elles se demanderont si elles doivent le dire. Dans la sphère professionnelle, elles auront tendance à se cacher, à vouloir rester à la deuxième place. Elle apprend à se camoufler, à l’instar de la pieuvre.
C’est en effet un animal auquel vous faites beaucoup référence. Pourquoi ?
En faisant mes recherches sur les multi-potentiels, cela m’est apparu comme image : la femme’pieuvre’, celle qui a plusieurs cœurs, plusieurs cerveaux… Cela renvoie aussi à la déesse Shiva et à ses multiples bras.
Il y a une certaine intensité chez les femmes atypiques : quand elles sont inspirées par quelque chose, elles y vont tellement à fond… Elles peuvent tout sacrifier. C’est une intensité qui est souvent jugée et peu tolérée et donc mal vécue par ces femmes qui se disent ‘je suis trop’. Or, ce dont elles ont besoin, c’est de comprendre cette intensité pour justement l’utiliser comme un potentiel.
Pour autant, ne parle-t-on pas davantage de ces profils ?
Ce sont des profils qui se sentent toujours un peu exclus. Souvent, on ne tolère pas l’atypisme au-delà d’un certain cadre. Or, c’est une perte pour l’entreprise de ne pas comprendre ça. C’est justement en dehors du cadre que ces personnes amènent leur plus-value. Sortir du cadre suppose que ça sera l’anarchie. Mais ces femmes atypiques sont très raisonnées : on peut imaginer un cadre pour elles. Si elles sont en accord avec ce cadre-là, elles en feront de la magie.
Cela passe-t-il par les conditions de travail ?
Par exemple. Certaines femmes atypiques ont adoré la période de total télétravail car elles étaient moins soumises à la charge sociale à la machine à café par exemple, elles avaient moins la sensation de perdre leur temps en réunion. Elles ont réalisé que le cadre imposé par la structure ne leur convenait pas. Chez les femmes atypiques, il y a un vrai besoin d’introversion, de passer du temps seule, et ce temps est souvent diminué.
Beaucoup de femmes sont conditionnées. Elles ne réalisent même pas qu’elles pourraient faire autrement. Elles sont tellement dans l’inhibition intellectuelle, qu’elles se ferment toutes les portes. On parle alors même d’anorexie intellectuelle : elles refusent de se nourrir intellectuellement pensant qu’elles n’en ont pas besoin.
Tout l’enjeu est de leur proposer : ‘et si ?’. D’emblée, elles estiment ne pas être à la hauteur, ne pas être faites pour cela, ne plus avoir le bon âge : elles ont toujours une excuse. Pourtant, lorsqu’on sème les graines du ‘et si ?’ et qu’on l’arrose, il y a tout un processus qui se crée.
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