A chacun sa colère. Cette dernière ne s’avère pas forcément néfaste si on en prend conscience et si on parvient à l’exprimer. Dans le cadre du travail, elle peut même amener à une forme d’empathie envers l’autre. Détails avec Karine Danan, psychopraticienne et auteure du livre 50 exercices pour se libérer de la colère (édition Eyrolles).
Comment la colère se traduit-elle ?
L’expression de la colère est différente d’une personne à l’autre : nous n’avons pas tous la même manière de la manifester. Dans les expressions de la colère qui s’avèrent problématiques, je distingue quatre sortes différentes : la colère étouffée (celle que je ne vais pas reconnaitre, ou je vais en être conscient mais je ne vais pas la nommer), la colère rentrée (je me sens en colère mais je ne suis pas dans la capacité de l’exprimer verbalement), l’hypercolère (la manifestation grandiose, explosive, de la colère) et la colère défléchie (elle n’est pas exprimée au bon endroit ou à la bonne personne : on remplit un vase de colère que l’on déverse sur une personne qui n’y est pour rien).
Parfois, une colère peut-elle être bonne ?
Oui, la cinquième façon de manifester sa colère, c’est de la nommer avec le plus de calme possible. Elle sera mise en mots et ne sera pas violente. La colère devient néfaste si on projette sur l’autre ou si on l’accuse d’être la source de tous les maux. Une colère nous appartient et c’est notre responsabilité de nous en occuper, ce n’est pas à l’autre.
Est-ce une émotion qui est méconnue ?
Beaucoup ont peur de la colère, car on confond souvent la colère et la violence. Or la violence, c’est l’expression extrême de la colère. On peut ressentir de petites colères, issues de frustrations que l’on peut avoir dans son quotidien : celles-ci sont peut-être moins connues, en effet. Et elles ont besoin d’être exprimées pour, justement, ne pas remplir le vase et le faire déborder…
Comment gérer sa colère dans le cadre du travail ?
Il faut faire la différence entre la colère que l’on ressent et celle des autres. La sienne, il faut la reconnaitre, c’est dire ‘je me sens en colère’. Ainsi, on la nomme pour soi, comme on peut la nommer pour les autres. Ensuite, il s’agit de mettre en lumière le besoin qui n’a pas été comblé. Souvent, quand il y a de la colère, c’est que quelque chose ne se passe pas comme on veut. Il faut donc retrouver ce besoin, en prendre conscience. Ce besoin en tête, soit je le comble moi-même, soit je demande à quelqu’un de m’aider à le combler. Cela peut être, par exemple, la nécessité d’une reconnaissance pour un travail accompli.
Et si on ne peut pas combler ce besoin, est-ce que cela ne va pas nourrir la colère ?
Il faut alors basculer sur la notion du lâcher prise : est-ce que je peux lâcher prise sur les choses que je ne peux pas contrôler ? La colère part aussi de l’idée de toute puissance, de l’idée que l’on pourrait tout contrôler. Or certaines choses ne peuvent pas l’être, car elles ne nous appartiennent pas.
Comment appréhender la colère de l’autre ?
C’est plus complexe car, souvent, la colère des autres nous renvoie à des événements liés à notre histoire, voire à des colères passées. C’est pour cela que face à la colère de l’autre, il faut s’interroger : qu’est-ce que je ressens, moi ? Quelle est mon émotion ? De la peur ? De la compassion ? Si l’autre est en colère, c’est que lui-même a un besoin qui n’est pas comblé. Donc, peut-être que je peux regarder les choses sous cet angle : je vais commencer à m’intéresser à l’autre.
Dans le cadre du travail, cela passe par l’échange, le dialogue et une forme d’empathie, qui s’intéresse à ce qu’il y a en-dessous de cette colère. Si un manager exprime de la colère pour le travail qu’on a réalisé, on peut s’interroger : quel est le risque pour lui ? Qu’est-ce qu’il se passe derrière ? Cela permettra, de plus, de prendre de la distance avec la colère de l’autre.
Lâcher prise, distance : la clé est-elle de prendre du recul ?
Il s’agit en effet de prendre du recul, pour pouvoir se remettre à penser. Quand on est dans l’émotion, on a du mal à réfléchir et à trouver des solutions. Celles que l’on trouve sous le coup de la colère ne sont généralement pas très efficaces. C’est pour cela qu’il est possible de réaliser des exercices de méditation ou d’expression autre de la colère : il s’agit d’aller décharger cette énergie ailleurs pour pouvoir retrouver ses esprits. A chacun de trouver la méthode qui lui convient.
En pratique : éviter la colère rentrée
Lisez le texte et répondez aux questions.
« Je me souviens d’une situation où je voulais exprimer ce que je ressentais et je ne trouvais pas mes mots alors qu’il était urgent que je parle. Plus je voulais m’exprimer, moins j’y arrivais. Je sentais une tension interne de plus en plus forte. Cette colère que je n’arrivais pas à exprimer à l’autre avec des mots se transforma en agitation (grands gestes, bégaiement, grognement…), ce qui n’arrangea rien. Finalement, je me mis à pleurer et à me frapper la tête. »
Et vous, avez-vous un souvenir d’une fois où vous n’avez pas réussi à exprimer cette colère que vous ressentiez ? Notez ici votre souvenir :
- 1 – Ce jour-là, il s’est passé que je …
- 2 – Je sentais de la colère parce que je…
- 3 – Alors j’ai…
Vous avez réussi à dire ou écrire votre colère. Bravo ! Une colère nommée est une violence évitée.
Extrait de 50 exercices pour se libérer de la colère, de Karine Danan, éditions Eyrolles, novembre 2022, 128 pages, 12 €.
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